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dâorigine africaine, telles que le candomblĂ©
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. Les diverses confréries et terrei-
ros (lieux de culte), auxquels Kehinde rend visite ou dont elle fera partie en
tant quâapprentie, seront presque majoritairement commandĂ©es ou composĂ©es
par des femmes Noires et souvent des femmes sans hommes. Câest le cas de la
Nossa Senhora da Boa Morte â irmandade religieuse afro-catholique (p.608) et
de la Casa das Minas
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â terreiro dĂ©diĂ© Ă la formation des vodunsi (prĂȘtresses)
pour le rituel du culte du vaudou (p.595). Dans cet endroit mystique, Kehinde co-
habite avec vingt femmes en participant Ă lâorganisation des activitĂ©s religieuses
secrĂštes. Elle accomplira la moitiĂ© de sa formation de vodunsi, jusquâĂ ce quâelle
dĂ©couvre que ce nâĂ©tait pas sa mission.
Toutefois, ce passage de Kehinde par la Casa das Minas, a une signiîżcation trĂšs
importante dans le rĂ©cit parce quâil anticipe son retour en Afrique et aux origines
du vaudou qui représentent le lien avec sa grand-mÚre. La foi religieuse est donc
fondamentalement dans le récit car elle constitue un pouvoir transmis dans la
matrilinéarité. Etant donné que la religion tient une place importante et traverse
le personnage central de Kehinde ainsi que tous les autres, par différents rites,
pratiques et croyances religieuses, on trouve tout au long du récit des explica-
tions minutieuses par rapport à chacune de ces pratiques. On voit la volonté de
lâauteure Ana Maria Gonçalves dâexpliquer et de dĂ©construire les stĂ©rĂ©otypes de
la sauvagerie primitive, de la diabolisation ou de la théùtralisation portés sur les
cultes religieux dâorigine africaine, construits par les religions chrĂ©tiennes dans
14 Le candomblĂ© est une religion dâorigine africaine qui sâorganise autour du culte des orixĂ s, divinitĂ©s intermĂ©-
diaires entre un dieu suprĂȘme (Olorun) et les hommes. Lâincorporation dâune divinitĂ© dans lâinitiĂ©, rituellement
préparé à la recevoir, représente le moment culminant du culte. Le terme candomblé indique également le lieu
de culte, aussi appelé terreiro. Les cérémonies du candomblé ont pour principal objectif le contact avec les
orixĂĄs, qui prennent possession du corps des initiĂ©s ou îżlhos-de-santo. Ces divinitĂ©s dâorigine yoruba reprĂ©-
sentent des forces de la nature (le vent, lâeau, les Ă©clairsâŠ), des activitĂ©s sociales comme la chasse et la guerre,
ou bien des maladies comme la variole. Les orixås trouvÚrent leur place au Brésil par le syncrétisme avec les
saints catholiques dans le contexte colonial. Voir Ă ce sujet Bastide (2000, 1995), Lopes (2008) et Verger (1982).
15 Cette période de formation sur le rituel du vaudou met surtout en évidence cet endroit qui, de nos jours, est en
voie de disparition, sans que son histoire, liĂ©e Ă un passĂ© ancestral en commun avec lâactuel BĂ©nin, soit connue
de la majorité de la population. Selon Sergio Ferreti (2003), la Casa das Minas a été fondée, au début du XIX
Ăšme
siÚcle. Elle est considérée comme la maison précurseure du culte du tambor: «Culte qui se caractérise comme
une religion de transe ou de possession, dans laquelle les entités sont adorées et incorporent les participantes,
principalement les femmes et surtout pendant les fĂȘtes, avec les chants et les danses exĂ©cutĂ©s par les tambours
ou instruments. DâoĂč le terme tambor, par lequel sont aussi dĂ©signĂ©s de tels cultes» (Ferreti, 2003, p.9). Selon
Verger (1952), le culte du vaudou de la Casa das Minas aurait Ă©tĂ© introduit au BrĂ©sil par la Na AgontimĂ©, lâune
des Ă©pouses du roi Agonglo et mĂšre du roi Guezo (1818-1858), qui, aprĂšs lâassassinat de son mari,
fut vendue
comme esclave par le roi Adandozan. Selon lâauteur, les registres montrent que le roi Guezo a envoyĂ© plusieurs
expéditions au Brésil et à Cuba à la recherche de sa mÚre sans avoir de succÚs. Toutefois, dans la Casa das Mi-
nas, le chef vaudou est ZomadÎnu, une divinité du culte de la famille royale de la reine mÚre de Guezo. Comme
les vaudous sont des entitĂ©s ancestrales de la famille, câest ainsi que Pierre Verger a dĂ©couvert que la Noche Nae,
prĂȘtresse fondatrice de la Casa das Minas, Ă©tait AgontimĂ©, la reine victime de la traite.
roseLi barbosa dos reis
Cuadernos de Literatur a deL C aribe e Hi spanoamér iCa ⹠i ssn 1794-8 290 ⹠no. 22 ⹠JuLio -diCiem bre 201 5 ⹠159 - 185